À l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry, elle jongle entre ses études d’informatique et son métier de coiffeuse. Dédé Catherine Beavogui, 23 ans, bouscule les codes et incarne une jeunesse guinéenne audacieuse.
Un salon discret au cœur du campus
Au détour d’un couloir de l’Université Gamal Abdel Nasser, un petit espace transformé en salon de coiffure attire chaque jour une clientèle fidèle. Derrière la tondeuse, une jeune femme concentrée, gestes précis, regard déterminé : Dédé Catherine Beavogui. Étudiante en 3e année d’informatique, elle consacre chaque pause et chaque fin de journée à coiffer des hommes. Une passion atypique qu’elle assume pleinement.
> « C’est ma mère qui m’a soufflé l’idée. Elle m’a dit un jour : « Pourquoi ne pas essayer la coiffure pour hommes ? Il n’y a pas beaucoup de femmes dans ce domaine. » Et j’ai tenté. Aujourd’hui, c’est ma passion. »
Informatique et coiffure : deux mondes qu’elle conjugue au présent
Entre les lignes de code et les lignes de coupe, Catherine organise ses journées avec rigueur. Elle enchaîne les cours, puis ouvre son petit salon. Le week-end, elle reçoit sur rendez-vous, parfois jusque tard dans la nuit. Elle reconnaît que le rythme est exigeant, mais nécessaire pour se construire une indépendance.
> « Je veux réussir dans les deux. L’informatique, c’est mon avenir académique. La coiffure, c’est mon entreprise. »
Une ambition qui inspire ses enseignants et camarades
Loin de passer inaperçue, son engagement est salué par ceux qui la côtoient au quotidien. Son enseignant principal parle d’elle comme d’« une élève sérieuse, passionnée, qui ne fait pas de compromis sur la qualité, ni dans son travail scolaire, ni dans son métier ». Ses camarades, eux, admirent son courage.
> « Elle montre qu’on peut étudier, travailler, et rester fidèle à soi-même. Elle nous motive à sortir des sentiers battus. », témoigne un camarade de promotion.
D’une honte supposée à une fierté assumée
Dédé Catherine n’a pas toujours été soutenue. Les débuts ont été marqués par le scepticisme, parfois le rejet. Une femme qui rase des hommes ? Certains jugeaient cela déplacé.
Mais le talent finit toujours par parler.
> « À un moment, j’ai arrêté de me cacher. J’ai décidé d’assumer ce que je suis, et ce que je sais faire. C’est aujourd’hui ma fierté. »
La tech au service de la tondeuse
Future informaticienne, elle ne compte pas laisser son métier artisanal en marge du numérique. Elle développe un projet d’application mobile pour gérer les rendez-vous, proposer des styles personnalisés, et améliorer l’expérience client.
> « Je veux créer une appli simple et utile, pour moi et pour d’autres coiffeurs. C’est ça, l’innovation locale. »
Un rêve mondial, un message local
Son ambition ne connaît pas de frontière. Catherine rêve un jour de coiffer des chefs d’État, des artistes de renommée, des icônes.
Mais plus encore, elle veut être une source d’inspiration pour les filles de son pays.
> « Je dis à toutes les jeunes filles : vous n’êtes pas obligées d’attendre qu’on vous aide. Soyez utiles à vous-mêmes. Créez, osez, travaillez. »
Une pionnière des temps modernes
À 23 ans, Dédé Catherine Beavogui ne se contente pas de rêver. Elle construit, coupe, code, et trace une voie qui lui ressemble. Dans un monde encore figé dans les rôles genrés, elle incarne un souffle nouveau.
Étudiante, coiffeuse, entrepreneure… Dédé Catherine redéfinit les contours de l’ambition féminine en Guinée.
Yves Alhassane Bamba Yimbayanews.com